Revue Z14



Bichromie rouge et noir
Format : 210×308 mm, 208 pages
Sortie en librairie : mai 2021
5000 exemplaires

Conception graphique :
Isabelle Le Roux & Malou Eude

Imprimeur : Corlet, Normandie.

Numéro actuellement disponible en librairie
15 euros / ISBN 9782491109073


Disponible ici

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Grenoble

Et l’école elle est à qui ?


De sa première rentrée scolaire, qui se souvient ? Quelques émotions enfouies, un mot de la maîtresse cinglant comme une gifle, un secret échangé derrière les toilettes, une guirlande de fleurs lors d’une sortie scolaire. Courir à la récré avec un ballon ou avec la boule au ventre. À l’automne 2020, au moment de partir enquêter sur l’école primaire, on a eu peur de ne pas pouvoir y retourner. Fermées durant deux mois au premier confinement, subitement devenues priorité nationale après l’assassinat de Samuel Paty, les écoles allaient-elles rester closes pendant le second confinement que venait d’annoncer le gouvernement ? De mars 2020 à avril 2021, plus d’un an d’incertitudes permanentes, pour la revue comme pour tout le monde. Plus d’un an à jouer avec les règles du gouvernement, à s’écharper sur celles que l’on devrait inventer nous-mêmes, à mettre et enlever nos masques au gré de la dernière discussion en date. Une position bien trop fragile pour prendre parti dans les batailles autour des protocoles sanitaires. Pour autant, nous ne pensons pas que la pandémie ait subitement réduit les luttes des classes à une question de masques. Alors on s’attaque à cette institution surpeuplée et sous-dotée qu’est l’école publique, en se demandant quels types d’adultes elle façonne. En démontant le mythe persistant de la méritocratie renouvelé par l’obsession de l’évaluation. En cherchant la subversion d’un lieu matrice des inégalités de genre, où la prévention des violences n’existe quasiment pas, où les associations qui permettent aux enfants de libérer leur parole sont chassées par la hiérarchie. En démasquant enfin l’hypocrisie d’une « éducation au développement durable » qui culpabilise les héritiers·ères d’une planète en feu. Et on la défend, à longueur de lignes, parce que les gosses s’y confrontent à l’altérité, y apprennent parfois à réfléchir, y échappent à la famille et à l’entre-soi de certains établissements privés, et parce qu’on peut s’y battre pour en faire un lieu d’émancipation. C’est à Grenoble qu’on a mis ces questions au travail, en flottille de vélos jaunes, à quadriller les rues plus ou moins désertées, jusqu’au sommet de la Bastille, point surplombant la ville nimbée de son nuage de pollution. Mais pas question de rester sur notre estrade : c’est avant tout au ras des pratiques et à hauteur d’enfant que s’observe l’école, entre classes nature, atelier de collage de rue et salles aux fenêtres grandes ouvertes en plein mois de novembre. L’itinérance terminée, notre petite bande dispersée a fabriqué la revue comme elle a pu, accaparée par d’autres enjeux : des boulots pour gagner sa croûte, des menaces sur deux squats où certain·es vivent et s’organisent,

Roussayrolles, le 6 avril 2021